
Le député Les Républicains du Val-de-Marne, Vincent Jeanbrun, a été nommé ministre du Logement par le nouveau (et ex) Premier ministre, Sébastien Lecornu. Une nomination qui n’a pas manqué de faire réagir le secteur.
Cette figure montante Les Républicains (exclu du parti depuis sa nomination) est connue pour ses prises de position pour le moins musclées. Ancien maire d’Haÿ-les-Roses (Val-de-Marne), Vincent Jeanbrun avait commencé à faire parler de lui lors des émeutes de 2023, consécutives au décès de Nahel Merzouk. Son domicile avait été attaqué à la voiture-bélier.
Un rapport controversé
En juin 2025, il a présenté un plan banlieue baptisé « Réparer les quartiers, rétablir la République », qui comportait un pilier aménagement et logement et défendait des idées controversées.
Le rapport défend notamment la fin du logement social à vie : « Concrètement, il faut établir une véritable contractualisation du logement social pour une durée déterminée », peut-on y lire. Le ministre défendait par là : « une meilleure prise en compte de la typologie des ménages ». A quoi s’ajoutaient des conditions pour bénéficier d’un logement social et y rester : « Un casier judiciaire exempt de condamnation pendant dix ans pour des faits de violences ou de trafic de drogue. Ne pas être propriétaire d’un logement secondaire dont la valeur est au moins égale au montant de son logement social. » Le ministre demandait également la mise en place d’un droit de veto donné aux maires concernant l’attribution des logements sociaux.
Le texte proposait également la nationalisation du DALO (Droit au logement opposable) : « et de proposer aux demandeurs de logement social la possibilité d’aller vers des régions où la tension dans le parc social est moins importante, en accompagnant ces demandeurs dans leur déménagement et leur installation, particulièrement dans les territoires où l’on constate des besoins de main-d’œuvre. »
C’était aussi l’interdiction du paiement en liquide des loyers, pour limiter la circulation « d’argent sale dans nos immeubles ». Le plan évoquait également un « plafond anti-ghetto », consistant à limiter à 30 % le taux de logements sociaux dans chaque commune. Il prônait aussi l’exclusion des familles de délinquants du parc social : « Il s’agit de dire clairement qu’on ne peut à la fois détruire le vivre-ensemble et bénéficier de la solidarité nationale », justifie le rapport.
Vincent Jeanbrun défendait également l’idée qu’aucune résidence ne devait rester HLM ad vitam aeternam et qu’une date limite devait être fixé dès leur construction, afin que les logements soient ensuite vendus et intégrés au parc privé.
Une nomination accueillie plus ou moins favorablement
Du côté de l’opposition, la nomination a vivement fait réagirn notamment à gauche. « Nommer Vincent Jeanbrun, l’auteur d’un rapport ultra-réactionnaire proposant la vente massive de logements sociaux, ministre du Logement, est une provocation caricaturale », a par exemple écrit sur X Jacques Baudrier, adjoint à la maire de Paris, chargé du Logement et de la Transition écologique du bâti.
François Piquemal (NFP-LFI) a déclaré, toujours sur X : « Ceci n’est pas une blague: Au logement de ce gouvernement éphémère nous aurons donc Vincent Jeanbrun. Visé actuellement par une enquête pour prise illégale d’intérêt sur l’attribution de logements. » Le ministre aurait fait loger deux de ses collaborateurs dans des logements appartenant à un syndicat intercommunal pour un loyer avantageux.
Du côté des professionnels, la nomination de Vincent Jeanbrun est accueillie un peu plus favorablement, mais — instabilité politique et crise du logement obligent — avec beaucoup de prudence. « Si la FNAIM salue la nomination de Vincent Jeanbrun en tant que ministre de plein exercice du Logement et de la Ville, elle appelle le nouveau ministre à se mettre au travail rapidement, tant les défis à relever sont nombreux », a déclaré la FNAIM (Fédération nationale de l’immobilier, ndlr) dans un communiqué. Citant pêle-mêle : permettre aux Français de se loger, relancer l’accession à la propriété, redonner confiance aux investisseurs, dynamiser le marché locatif et rétablir les équilibres territoriaux.
L’UNIS (Union des professionnels de l’immobilier) a, quant à elle, publié une lettre ouverte sur LinkedIn, dans laquelle elle décrit un ministre, au-delà des politiques qu’il défend sur le logement social, comme quelqu’un conscient « de l’insuffisance criante du parc locatif privé ». Sans évoquer directement le nouveau ministre, la FFB (Fédération française du bâtiment) a demandé au gouvernement « de se mettre immédiatement au travail sur les sujets logement, construction et immobilier » : logement neuf, statut du bailleur privé, logement social, MaPrimeRénov’ et REP bâtiment en tête.
Beaucoup de dossiers brûlants attendent donc Vincent Jeanbrun, dont l’action sera scrutée de près par les acteurs du secteur. À condition que le ministre puisse effectivement se mettre au travail. Rappelons que le Rassemblement national et La France insoumise ont déjà déposé leur motion de censure.

