Côté magazine
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Béton : complément d’isolation
Avec la RE 2020 et des demandes environnementales de plus en plus fortes, les procédés constructifs en béton – banches, blocs, prémurs, béton cellulaire – évoluent. En plus de la décarbonation, les industriels s’intéressent aussi à la capacité des produits à isoler ou à apporter un complément d’isolation. De nombreuses options techniques sont d’ores et déjà disponibles.
Isoler avec le béton, une hérésie ? Non, le renforcement progressif des réglementations thermiques a donné naissance à de nombreuses solutions techniques, qui toutes apportent par la structure un complément d’isolation. Pour y parvenir, deux axes ont été étudiés par les industriels du secteur : apporter des propriétés isolantes au matériau béton ou le proposer associé à un isolant, parfois lui-même 100 % minéral ou végétal. Précision importante pour les maîtres d’ouvrage, maîtres d’œuvre et entreprises : ces produits aux propriétés améliorées – prémurs, blocs de béton ou voile coulé en place – ne modifient pas ou peu les modes constructifs et leur mise en œuvre, qui restent parfaitement maîtrisés par les entreprises.
Alternative béton
Cette démarche vise deux objectifs : réduire l’impact des bétons sur le plan environnemental et respecter la réglementation thermique, de plus en plus contraignante, sans pour autant augmenter l’épaisseur des parois. L’idée étant également de proposer une alternative, notamment en préfabrication et voile de façade, aux procédés d’isolation thermique par l’extérieur (ITE), de façon à promouvoir le béton brut, architectonique, en façade. Les architectes, friands des parements de béton, craignaient que le durcissement de la réglementation oblige à les recouvrir. Les bétons isolants apportent une réponse à cette problématique, y compris sur le plan du design. De leur côté, les fabricants de blocs de béton cherchent des solutions concurrentes à la brique de structure. En résultent des systèmes qui intègrent des isolants conventionnels, mais aussi, et de plus en plus souvent, une mousse minérale isolante à base de ciment. D’autres procédés visent à associer au béton des granulats végétaux pour apporter des propriétés d’isolation.
Stéphane Miget
Deux à huit fois plus isolants que des blocs traditionnels, les blocs de 20 cm Fabtherm AIR 0.6, 1.1 et 1.8, à base d’agrégats légers ou courants, intègrent une âme en mousse 100 % minérale Airium, qui renforce leurs capacités isolantes. Photo : Fabemi
« Avec la RE 2020 et le renforcement du Bbio, pour les maisons individuelles ou le petit collectif, la gamme blocs béton offrira très certainement des performances isolantes accrues. Le bloc traditionnel sera certes encore utilisé. Mais pour répondre à la double exigence Bbio et bas-carbone, les blocs dotés d’un complément d’isolation, avec R égal ou supérieur à 1, vont monter en puissance, à l’instar des briques terre cuite. Pour les mêmes raisons, on devrait assister en préfabrication à un développement important des murs à coffrage intégré isolé (prémur). Se développent également des solutions modulaires avec isolation intégrée pour structure à poteaux-poutres. Ces éléments architecturaux assurent un montage plus rapide des bâtiments. Les fabricants s’attachent également à limiter l’impact carbone des produits, comme des prémurs et façades modulaires, en utilisant, pour les fabriquer, des ciments de type CEM III, ou équivalent. Dans le cas des prémurs (ou murs à coffrage intégré), il est aussi possible d’utiliser, pour leur remplissage, des bétons bas carbone afin de réduire davantage leur empreinte. »
Solution 1
Isolation par l’extérieur
100 % minérale
Ce matériau isolant, sous forme de panneau, est composé des mêmes matières premières que celles entrant dans la fabrication du béton cellulaire. La seule différence réside dans la formulation qui autorise de plus faibles densités. Avantages ? Plus de légèreté lors de la pose et de meilleures capacités d’isolation. Ce panneau isolant minéral bénéficie, en effet, d’une conductivité thermique de λ = 0,045 W/m.K et affiche un R de 4,4 m2.K/W pour une épaisseur de 200 mm. À épaisseur égale, la performance est moindre que celle d’un isolant classique, mais la masse volumique élevée pouvant atteindre 115 kg/m3 permet de disposer d’une structure monolithique comparable à un mur massif, ce qui signifie davantage d’inertie. Autre intérêt, le caractère incombustible du matériau : s’il est naturellement adapté à l’isolation des parois en béton cellulaire, il est également tout à fait compatible avec les autres matériaux de structure, en neuf comme en rénovation.
La résidence du Pressoir, à Corbeille-Essonne, fait peau neuve, avec la mise en œuvre d’un système alternatif d’isolation thermique par l’extérieur (ITE) 100 % minéral, Multipor Ytong Siporex. Photo : Laisné, architecte
Affichant une résistance thermique R = 1,7 m2.K/W, le bloc Kosmo City, bloc rectifié avec mousse Airium, bénéficie de la certification NF Th. Photo : Alkern
Solution 2
Bloc béton isolant minéral
C’est probablement la plus grande évolution constatée sur le marché des petits éléments de maçonnerie ces dernières années : le développement du bloc béton rectifié, qui intègre une mousse de béton isolante 100 % minérale (Airium de Lafarge). L’une de ses principales caractéristiques réside dans sa faible densité de ciment – jusqu’à six fois moins que le béton classique –, ce qui permet de piéger un grand volume d’air à l’état sec et d’obtenir des propriétés thermiques comparables à celles des matériaux d’isolation traditionnels. Ainsi, son coefficient d’isolation thermique (lambda de 0,035 W/m.K à 0,10 W/m.K en fonction de la densité) est comparable à celui d’une laine minérale. Les blocs de 20 cm remplis avec cette mousse affichent un R de 1,7 m2.K/W. Pour ce qui est de la mise en œuvre, les blocs sont rectifiés pour assurer une pose à joint mince.
Solution 3
Béton structurel complément d’isolation
Ces bétons isolants structurels sont destinés à la réalisation de voiles de façade coulés en place (utilisables en préfabrication). Formulés spécifiquement à base de granulats légers – type schiste, argile ou ponce –, d’adjuvants et d’additions minérales, ils offrent une grande légèreté (1,4 t/m3), affichent une conductivité thermique réduite – λ de 0,45 W/m.K à 0,60 W/m.K pour les plus performants –, et ce, sans nuire à la résistance mécanique (25 MPa). La réduction des déperditions permet de répondre à la réglementation thermique 2012 (RT 2012) et bientôt environnementale (RE 2020), Préparés industriellement par mélange en centrale et coulés sur chantier, ils ne nécessitent aucune adaptation des méthodes constructives (coffrage, banche, etc.) : ils se coulent et se vibrent comme un béton classique
Le béton prêt à l’emploi Thermedia 0.6 B de Lafarge associe performances thermiques (l = 0,54 W/m.K) et performances structurelles (Rc = 25 MPa). Photo : Lafarge
Naturbloc Bois d’Alkern, fabriqué avec les déchets de palettes usagées, permet d’intégrer 28 kg de bois par mètre carré de mur. Résistance mécanique fb de 4,07 MPa ; résistance thermique : R = 0,85 m².K/W. Photo : Alkern
Solution 4
Agrégats biosourcés
Les recherches et expérimentations sur les blocs de béton ont abouti au développement d’une offre de produits qui intègre des constituants biosourcés : copeaux de bois, miscanthus, chanvre… Dans le cas du bois, des expériences ont été réalisées avec des blocs incorporant des copeaux qui proviennent du broyage de palettes réformées. Pour le chanvre et le miscanthus, il s’agit d’un développe ment commun de la filière agricole qui cherche de nouveaux débouchés et des fabricants de blocs de béton qui, eux, s’attachent à réduire le bilan carbone de leurs produits. Ces derniers acquièrent, en outre, des propriétés de complément d’isolation : R de 0,7 à 1 m2.K/W, contre 0,2 pour les blocs traditionnels. Des produits qui sont difficiles à caractériser sur le plan normatif, ce qui conduit les fabricants à s’engager dans des Avis techniques.
Solution 5
Prémurs isolés
Alternatifs à la solution du banchage, les murs à coffrage intégré (MCI) ou prémurs sont appréciés des maîtres d’œuvre pour réaliser des produits finis difficiles à couler en place : ciment blanc ou coloré, avec des finitions sablées, brossées, texturées… Ils sont désormais de plus en plus proposés avec une isolation intégrée. Le système comporte deux parois en béton armé d’épaisseur variable, maintenues espacées par des connecteurs. Ces parois prennent en sandwich un isolant, dont la matière (PSE, laine minérale…) et l’épaisseur varient selon les caractéristiques thermiques recherchées. Les connecteurs sont composés de fibre de verre et moulés de thermoplastique. Leur rôle est de garantir le bon écartement des deux parois. Les raidisseurs ne sont maintenus que sur une seule paroi (la future paroi intérieure) pour éviter les ponts thermiques.
Le prémur isolé présente trois avantages : isolation en continu sans pont thermique, optimisation de l’inertie de la paroi et qualité de parement extérieur. ThermoPrémurs par Rector Photo : Rector
Cet article est extrait de Planète Bâtiment n°67 > Consulter la version numérique <
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